La Première ministre Elisabeth Borne © Twitter
Politique : le nouveau gouvernement Borne, un collectif 50/50 de façade, avec une surprise de taille à l’Education nationale
Nommé vendredi 20 mai, le nouveau gouvernement d’Elisabeth Borne, s’énorgueillit de respecter la parité. 14 hommes et 14 femmes, dont la Première ministre. Sauf que quand on y regarde de plus près, ce sont encore les hommes qui ont les postes régaliens.
En nommant une femme Première ministre, Emmanuel Macron n’a fait que rattraper un train de retard au regard de ses voisins européens. Quand on sait que l’Angleterre a connu en son temps deux femmes à la tête du Royaume-Uni avec Elisabeth II et Margaret Thatcher de 1979 à 1990, et que la Suède, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, la Slovaquie, et la Lituanie ont une femme qui dirige leur gouvernement. Le Président de la République française ne pouvait faire autrement que rattraper un retard voire une injustice, à l’air du MeToo et du Balance ton porc. C’est donc fièrement, cinq jours après la nomination d’Elisabeth Borne à Matignon, que le nouveau gouvernement a été annoncé le 20 mai sur le perron de l’Elysée par son Secrétaire général comme le veut la tradition.
Les hommes aux postes régaliens comme d’hab
Manifestation lors de la journée internationale pour les droits des femmes à Toulouse le 8 mars 2020. © ALAIN PITTON
Le symbole est là il faut le saluer, la France a pour la deuxième fois de son Histoire, après Edith Cresson en 1991, une Première ministre, une femme à qui on va sans doute demander d’être deux fois plus compétente qu’un homme. Sauf qu’en matière de parité rien de nouveau. Celui d’Edouard Philippe dans sa toute première équipe comptait 11 hommes et 11 femmes. Jean-Marc Ayrault, nommé par François Hollande au début de son mandat, affichait 50 % d’hommes pour 50 % de femmes avec 34 postes. Idem pour le second mandat avec 38 postes. Voilà pour la façade, car le pouvoir comme chacun sait est une histoire d’homme. Dans le gouvernement Borne, ce sont les hommes qui détiennent les postes régaliens, et les femmes les secrétariats d’Etat. Armées, Intérieur, Justice, Economie et Finances, restent entre les mains des hommes, exceptée Catherine Colonna, qui hérite du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Presque qu’une régression, alors que des femmes issues de la diversité comme Christiane Taubira sous Hollande et Rachida Dati sous Sarkozy ont été ministre de la Justice, et Michèle Alliot- Marie recorde woman toute catégorie des postes régaliens : Défense, Intérieur, Justice et Affaires étrangères de 2002 à 2011. Tous les secrétariats d’Etat dans ce gouvernement Borne, reviennent ainsi aux femmes. Olivia Grégoire, porte-parole du gouvernement en remplacement de Gabriel Attal promu ministre délégué aux Comptes publics, Justine Benin chargée de la Mer, à qui l’on souhaite du courage dans le dossier des Sargasses qui polluent les Antilles françaises en même temps que le chlordécone, Charlotte Caubel chargée de l’Enfance, Chrysoula Zacharopoulou, chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux.
Les nominations chez les hommes qui détonnent
Pap Ndiaye © Services culturels Ambassade de France aux Etats-Unis
Paradoxalement c’est chez les hommes que les nominations détonnent. Tout d’abords la prise de guerre que représente l’ex président du groupe LR à l’Assemblée nationale Damien Abad. Ce dernier avait été en 2012, le premier élu handicapé à siéger à l’Assemblée. « Il est atteint d’une maladie rare, l’arthrogrypose, qui bloque ses articulations et réduit sa mobilité », rapporte l’AFP. Une enquête de Médiapart révèle que l’ancien patron des députés LR, Damien Abad, a été nommé ministre des solidarités en dépit d’un signalement pour des faits présumés de viols adressé à LREM et LR par l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique. Deux femmes, dont Mediapart a recueilli les témoignages, l’accusent de viols, en 2010 et 2011. Damien Abad conteste les faits.
L’autre nomination qui fait polémique et donne « des cauchemars » à Marine Le Pen, et Reconquête, est celle de l’historien Pap Ndiaye, accessoirement frère de Marie NDiaye la romancière, fils de Simone et Tidiane N’Diaye (ils ont fait le choix d’une graphie différente pour leur nom de famille), mais aucun lien avec Sibeth Ndiaye, ancienne secrétaire d’Etat et porte-parole du gouvernement d’Edouard Philippe. Si à droite cette nomination fait grincer des dents, à gauche elle est bien accueillie, plus surtout à l’extrême gauche et en particulier Jean-Luc Mélenchon, qui a salué la nomination de Pap Ndiaye. Ancien élève de Henri IV, et de l’École normale supérieure de Saint-Cloud, agrégé d’histoire, spécialiste des Etats-Unis où il a enseigné et des minorités, cet universitaire, de mère française et de père sénégalais, est l’un des pionniers en France à traiter de la question complexe de la population d’ascendance africaine vivant en France et de la diaspora. Son ouvrage paru en 2008, La Condition noire : essai sur une minorité française fait référence. A la tête du musée de l’Immigration, Pap Ndiaye a aussi siégé au conseil scientifique du CRAN le Conseil Représentatif des Associations Noires. Dominique Sopo président de SOS racisme, félicite le nouveau ministre de l’Education nationale dans un post sur son compte Facebook : « dans un gouvernement peu divers, la nomination comme ministre de l’Education nationale et de la jeunesse de Pap Ndiaye, homme issu de l’immigration subsaharienne, est un beau symbole ».
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